A Armissan, d’importants travaux dans la Clape interpellent

Depuis 2013, un terrain appartenant au site classé de "La Clape" fait l'objet de travaux importants, apparemment non compatibles avec le respect des contraintes environnementales attachées aux sites classés. Récemment, l'association RUBRESUS s'est intéressée à ce terrain et a interpellé les autorités sur ce sujet.

Vue du terrain en Juillet 2018 – Image issue de Google Earth

Nous vous proposons ci-dessous l’article rédigé par André Bories, président de l’association RUBRESUS, auquel nous avons rajouté quelques images destinées à appuyer le propos. En post-scriptum, nous reviendrons sur les moyens que nous avons utilisés pour produire ces images, lesquels sont à la disposition de tout citoyen.

La rédaction du Clairon

Un sacré chantier

Alors que le Massif de la Clape était interdit aux citoyens durant les deux mois de confinement par arrêté préfectoral, pelles mécaniques, bulldozer, camions n’ont pas chômé dans d’importants travaux de terrassement d’un terrain sur la commune d’Armissan, en bordure de l’A9, en site classé de la Clape. Un terre-plein de quelques 200 m de long, 150 m de large et de 5 à 7 m de haut est en cours de réalisation par extraction de terre de la Clape, soit une superficie d’environ 30 000 m2 et des dizaines de milliers de m3 de terre déplacés.

Des travaux « arrêtés », qui continuent de plus belle

Alertée de ces travaux, l’association RUBRESUS a interrogé, par un courrier en date du 21 avril 2020, le maire d’Armissan, les élus locaux, la sous-préfecture de Narbonne et la DDTM (1) sur le cadre réglementaire de tels travaux en site classé (lire ici la lettre adressée par Rubresus au maire d’Armissan) .

En réponse du 29 avril, le maire d’Armissan nous a fait part de sa demande d’arrêt des travaux et de la mise en demeure, dans le même sens, que la DREAL d’Occitanie (2) aurait signifiée (lire ici la réponse du maire d’Armissan).

Résultat sur le terrain : les travaux n’ont jamais cessé et semblent même avoir redoublé d’intensité, avec un ballet incessant: jusqu’à 3 camions charriant la terre creusée par l’une des grosses pelles mécaniques (35 t, 270 cv, godet de 1,4 m3 selon données constructeur), travaillant 6 j sur 7 et jusque tard le soir. Le 6 mai, RUBRESUS s’est informée auprès du maire, élus et autorités de la poursuite des travaux malgré l’injonction de la DREAL (lire ici la seconde lettre de Rubresus). Le samedi 9 mai les travaux se poursuivaient sans relâche. Impunément ?

Le chantier en mai 2020 – Photo RUBRESUS

L’œil du satellite

L’évolution du site au cours de ces dernières années montre l’accentuation et l’ampleur des travaux.

Évolution du terrain entre août 2006 et Juillet 2018 – © Google Earth

À partir de 2013, une première zone de plusieurs milliers de m2 a été remblayée au bas du terrain, avec dépôt de matières. Une noria de camions nauséabonds traversant Vinassan en direction d’Armissan, empruntant le premier chemin à gauche après le pont sous l’autoroute, s’était alors faite remarquer.

Depuis 2016, les photos satellite montrent une deuxième phase de travaux de plus grande envergure avec édification d’un haut talus en partie supérieure du site. Au fil des ans, le talus n’a cessé de s’allonger de part en part du site pour atteindre en 2020 près de 200 m de long et 150 m de profondeur, pour former, par le remblai avec la terre extraite dans la Clape, une plateforme d’environ 3 ha. Des photos des travaux en cours montrent l’importance des moyens et l’ampleur du chantier en site classé.

Vue du talus central, haut de plusieurs mètres – Photo RUBRESUS

Qu’en est-il des réglementations ?

Selon la cartographie des sites classés consultée (Inventaire National du Patrimoine Naturel), ce terrain serait situé en site classé Massif de La Clape, ce que confirme le maire d’Armissan dans sa réponse, mais aussi en zones classées Natura 2000 et ZNIEFF, bien que le maire avance le contraire.

Le diaporama ci-dessus montre que le terrain dont il est question dans cet article se situe entièrement
dans les zones ZNIEFF type II, Natura 2000 “Habitats” et partiellement dans la zone Natura 2000 “Oiseaux”
Images extraites du site gouvernemental GéoPortail – © IGN

Il conviendrait que les autorités, maire et élus locaux, précisent, par tout document approprié, le statut réel de ce terrain, les demandes déposées préalablement à de tels travaux, les autorisations accordées et pour quel projet. A ce jour (11 mai 2020), ni le maire ni les autorités n’en ont présenté un seul.

André Bories (RUBRESUS) et Jean Cordier, pour le Clairon de l’Atax,  le 11 mai 2020

Post-scriptum quant aux images, à leurs sources et au questions qu’elles peuvent poser

Trouver les images qui nous ont permis d’enrichir et d’appuyer le texte d’André Bories n’a pas été très difficile et relève de moyens qui sont à la portée de tout citoyen un peu curieux, beaucoup patient et équipé d’un ordinateur moderne (datant de moins de 15 ans).

Pour les photographies du terrain proprement dit (couverture et diaporama de l’évolution du terrain), nous nous sommes servis du logiciel “Google Earth” et plus particulièrement de la fonctionnalité des images d’archive. Cette fonctionnalité permet d’afficher des versions antérieures et datées de la portion d’image aérienne que l’on est en train de consulter. C’est ainsi que nous avons pu constituer le diaporama d’évolution du terrain sur douze ans. Lequel diaporama montre que, depuis plus de 5 ans, ce terrain fait l’objet de travaux dont la mairie d’Armissan affirme aujourd’hui avoir demandé l’arrêt suite à la lettre de Rubresus, il y a un mois. Pourquoi a-t-il fallu attendre aussi longtemps pour prendre des mesures (non respectées à ce jour) concernant un terrain situé en  zone protégée ?

Pour la partie montrant que le terrain en cause est bien situé sur plusieurs zones protégées, contrairement aux affirmations du maire d’Armissan, nous avons eu recours à la très complète solution offerte gratuitement par le site gouvernemental “Géo Portail”. Cette application internet a la particularité de permettre la superposition de “couches” cartographiques choisies dans un référentiel très fourni, établi par de très nombreux contributeurs autorisés. En outre, elle permet à l’utilisateur d’annoter des portions de territoire par des textes, des symboles et des tracés. Nous avons  procédé de la façon suivante:

Le terrain en chantier – Délimitation (tracé et symbole) effectuée avec GeoPortail

  1. dans un premier temps, nous avons “annoté” la portion de territoire concernée en délimitant le terrain objet de l’article de Rubresus.
  2. ensuite, nous n’avons eu qu’a superposer sur cette délimitation et successivement, l’affichage des “couches” ZNIEFF II, Natura 2000 (Habitats, puis Oiseaux), pour visualiser comment le terrain s’incluait ou non dans ces couches. Le résultat figure dans le diaporama que vous avez pu consulter plus haut dans l’article.

 

 

Tout cela pour dire que nous ne sommes pas nécessairement démunis pour justifier nos propos et répondre aux affirmations bien souvent trop rapides de personnages officiels un peu trop sûrs d’eux.

De plus, si le maire d’Armissan avait eu l’idée de consulter Geo Portail, un outil destiné aussi aux responsables politiques, cela lui aurait évité d’affirmer des inexactitudes et, qui sait, l’aurait peut-être incité à prendre des mesures plus incisives à l’encontre de ce chantier qui, sauf démonstration contraire, semble bien entâché d’illégalité. Encore faut-il souligner que le maire d’Armissan a bien voulu répondre à Rubresus, ce qui, sauf erreur, ne semble pas être le cas des autres autorités sollicitées, savoir : le président du Grand Narbonne, le sous-préfet de Narbonne, la DDTM de l’Aude.

Dernière chose à propos de la diffusion de ces images: nous nous sommes assurés que nous respections les termes légaux qui, pour une publication gratuite telle que la nôtre, consiste essentiellement à créditer la source des images produites.

Jean  Cordier, pour la rédaction du Clairon de l’Atax, le 21 mai 2020

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Notes
  1. Direction Départementale des Territoires et de la Mer[]
  2. Direction Régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement[]
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Publié par La Rédaction du Clairon de l'Atax

3 commentaires

Décidément, entre les lotissements de luxe ,qui ont poussés comme des champignons au Capitoul et ces étranges terrassements d’Armissan, il semblerait que les élus de La Clape se foutent pas mal d’être en zone Natura!

Bonsoir,
Le propriétaire du terrain a t il été contacté ? Et quel est son projet? L’article n’ en parle pas.

La Rédaction du Clairon de l’Atax

Bonjour,
Dans sa réponse à la première lettre de Rubresus, le maire d’Armissan indique avoir demandé à un certain M.Laguzou de suspendre les travaux. On peut supposer qu’il s’agit là du propriétaire du terrain, mais nous n’en savons rien. Au-delà, on peut penser que, pour l’association Rubresus, il est plus pertinent d’interpeller les pouvoirs publics que le propriétaire du terrain, dans la mesure où il appartient aux pouvoirs publics de faire respecter la loi et de s’assurer de la conformité des projets aux contraintes attachées à l’endroit où ils ont lieu. En revanche, on aurait pu s’attendre à ce que le maire d’Armissan fournisse des indications sur la nature du projet en question, ce qu’il n’a pas fait.

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