Le fret ferroviaire en Narbonnaise

Avec la création de la ligne nouvelle Montpellier / Perpignan, l’étoile ferroviaire de Narbonne constitue un aménagement majeur qui engage l’avenir de Narbonne, cela demande une réflexion approfondie.

Pour lutter contre le réchauffement climatique, faisons du fret.

Pensons l’étoile ferroviaire de Narbonne.

Étoile ferroviaire de Narbonne (image de L. Fabas)

Le roulement acier sur acier induit peu de frottements. Cette propriété est la raison pour laquelle, si nous voulons améliorer l’efficacité énergétique du transport, nous devons opter pour le rail. Pour cela nous avons besoin d’infrastructures nouvelles.

L’avenir du fret ferroviaire sur l’arc méditerranéen

Barcelone – Gérone – Figueras – Perpignan – Narbonne – Béziers – Agde – Sète – Montpellier – Nîmes
En matière de transports de marchandises, l’État français projette, pour des raisons financières, de créer un goulet d’étranglement durable en direction de l’Espagne, mais aussi entre le Sud-Ouest et le Sud-Est de la France. La péninsule Ibérique n’est accessible par le rail au reste de l’Europe que depuis 2013 par un unique tunnel. L’évolution des pratiques est lente. La plupart des marchandises demeurent transportées par camion sur des axes surchargés. L’effort soutenu de l’Espagne pour développer un réseau répondant aux normes d’interopérabilité européenne, permet de projeter une montée en puissance de ce mode de transport dans les décennies à venir. On peut donc penser que l’absence de saturation de la ligne existante entre Perpignan, Narbonne et Sète, avancée pour justifier le sous-investissement, ne durera probablement pas.

L’enjeu est la mixité de la phase II de la Ligne Nouvelle Montpellier Perpignan (LNMP). Il s’agit ici d’une mixité marchandise/voyageurs, déjà assurée partout entre l’Espagne et la vallée du Rhône.  Le débat est technique et financier. Il porte sur les pentes acceptables par les convois de marchandises, sur les longueurs de tunnels, sur les bassins de rétention, sur la protection des paysages et sur les risques de submersion marine de la ligne existante. La région Occitanie vient d’obtenir que la SNCF étudie un tracé amendé. « Il est absolument indispensable de nous réinterroger sur la phase II », a martelé, jeudi 29 septembre, Carole Delga. En effet, une telle désignation fait penser à un sujet local et secondaire, alors qu’il faut se placer à l’échelle de l’Europe et sur un temps long pour en percevoir la cardinalité.

La réalisation de la phase I de la LNMP entre Montpellier et Béziers est à portée de vue. Elle fait suite à la mise en service du contournement ferroviaire de Nîmes et Montpellier et surtout de l’ouverture de la ligne entre Perpignan et Figueras en 2013 qui constitue le premier et le seul point autorisant le franchissement de trains entre la péninsule Ibérique et le reste de l’Europe. La création d’une ligne nouvelle sur l’arc languedocien est un sujet ancien qui se distingue depuis des décennies par son parcours cahoteux. Inscrit depuis 2004 en bonne place parmi les priorités du réseau transeuropéen de transport, il n’a cessé d’être repoussé pour dégager des financements en faveur de projets objectivement moins stratégiques. Cette ligne est un chaînon manquant du corridor n°3, dit méditerranéen, qui reliera le détroit de Gibraltar aux confins de l’Ukraine.

Questions autour de l’étoile ferroviaire de Narbonne

La mixité de la ligne nouvelle bouleverserait le fonctionnement du carrefour de Narbonne en matière de marchandises. Narbonne est devenue un carrefour ferroviaire dès 1858, lors de la création de la ligne en direction de Perpignan. Mais en l’absence de continuité vers l’Espagne, cet embranchement a connu un essor limité.  Narbonne s’est imposée comme un centre technique, incontournable dans le Sud de la France, car y convergeaient aussi les trains venant du Sud-Ouest et au-delà de l’Atlantique et ceux venant du Sud-Est et de la vallée du Rhône. Le dépôt ferroviaire, désormais au cœur de la ville, demeure un élément important de l’économie locale. Il n’est pourtant plus que l’ombre de ce qu’il fut, émoussé par les évolutions technologiques et les réorganisations. En 2001, il avait même provoqué l’évacuation d’une partie du centre-ville pour procéder à une opération délicate sur un wagon d’acide fluorhydrique, une substance extrêmement toxique. Jean-Luc Gibelin, cinquième vice-président de la région Occitanie en charge des transports, a précisé l’usage futur de la ligne existante : « Les trains du quotidien continueront à circuler sur cette ligne traditionnelle qui pourra également accueillir les trains de fret destinés au nouveau port de Port-La-Nouvelle ». En résumé, le fret à desserte locale continuerait à circuler depuis Narbonne sur la ligne de Bordeaux et sur celle de Perpignan jusqu’au port. Mais pour les autres dessertes il n’emprunterait plus la ligne de Sète où se trouve la gare de Narbonne. Il circulerait sur la ligne nouvelle vers Nîmes d’un côté et vers l’Espagne de l’autre.

Cette réorganisation a des impacts hors du périmètre strict de la ligne nouvelle. Le dessin présenté au débat en 2016 de l’étoile ferroviaire de Narbonne ne prévoit la possibilité d’accéder à la ligne nouvelle que pour les trains en provenance de Bordeaux. Les trains en provenance de Port-La-Nouvelle n’y auraient pas accès, ce qui réduirait le potentiel de développement du port. Pour y remédier, il faudrait construire une bretelle supplémentaire ou une une infrastructure permettant le rebroussement. Plus à l’est, la gare de triage se trouvant derrière la gare en centre-ville ne serait plus sur une ligne empruntée par des trains de fret. Déclasser ces espaces pour construire une nouvelle infrastructure en périphérie à l’ouest de la ville serait pertinent sur le plan logistique et porteur de potentiel économique. Cela constituerait également une opération immobilière avantageuse pour le propriétaire du réseau ferré. Le déclassement des espaces en centre-ville répondrait à des enjeux de sécurité, mais aussi il ouvrirait la voie à un projet urbain majeur pour la ville.

L’autre constat est que la ligne nouvelle acceptant le fret passerait derrière l’usine de Malvezi. Actuellement, les convois qui lui sont destinés passent en centre-ville. Un embranchement serait très pertinent. Il pourrait également permettre de redonner vie à la ligne de Bize-Minervois.

L’étoile ferroviaire de Narbonne constitue un aménagement majeur qui engage l’avenir de Narbonne, cela demande une réflexion approfondie

Laurent Fabas pour le Clairon de l’Atax le 22/10/2022

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