Le Capitaine Volkogonov s’est échappé (Капитан Волконогов бежал)

Russie – France – Estonie– 2021 – 2h – nomination pour le prix du Meilleur scénario à la Mostra de Venise
Un film de Natalya Merkulova et Aleksey Tchoupov avec Youri Borissov,Aleksandr Yatsenko, Natalya Kudryashova…

Remarque préliminaire : la traduction du titre laisse entendre un film comique dans le style de Gérard Oury avec Bourvil et de Funès, mais on en est loin.

Casquettes armée URSS-(Image par PixelAnarchy de Pixabay)

En effet, nous sommes en 1938, en URSS, à l’époque des grandes purges de Staline*. Le capitaine Fedor Volkonogov fait partie du NKVD, l’ancêtre du KGB. Lorsqu’il voit le suicide d’un de ses camarades, il comprend rapidement que ce sera bientôt son tour. Il va donc fuir, mais au hasard d’une vision d’un homme suicidé, il va comprendre qu’il lui faut obtenir le pardon de proches de ses victimes pour aller au paradis. Il va donc à la rencontre de son passé pour obtenir satisfaction.

Les metteurs en scène nous font descendre dans une véritable Cour des Miracles au milieu d’improbables lieux dantesques dans une faune de personnages monstrueux, sortes de marionnettes décaties qui ne savent plus faire la différence entre le bien et le mal ni dans quel camp se positionner.

Youri Borissov (l’acteur de ” Compartiment n°6″ et de  ” la fièvre de Petrov”), toujours aussi charismatique, nous donne à voir un individu terrifiant capable d’abattre froidement des innocents, qui rencontrera au terme de cette quête effrénée le pardon sous la forme d’une femme décharnée, moribonde, purifiée par l’eau que Fédor fera couler sur son corps (apparition de la douceur dans ce monde de brutes).

Natalya Merkulova et Aleksey Tchoupov se délectent d’un grand moment de dialectique où le supérieur de Volkogonov lui explique que tous ces gens torturés et exécutés sont effectivement innocents, mais que leur histoire pourra les amener à espionner et trahir. Il convient donc de tuer dans l’œuf les contrevenants au bien être du peuple et comme il n’y a pas de châtiment sans crime, on leur invente un crime !!  CQFD !! .

Le film a quelque chose de dérangeant dans le fait qu’il pourrait laisser croire que l’individu peut se livrer à n’importe quelle exaction et qu’il peut être absous s’il trouve un proche de ses victimes qui lui pardonne.

Malheureusement, les metteurs en scène ne se sont pas exprimés sur le sujet. Après avoir signé une pétition dénonçant l’invasion de l’Ukraine, ils ont quitté la Russie et pas plus que Youri Borissov; ils n’ont souhaité s’exprimer dans la presse.

Patricia Renaud pour le Clairon de l’Atax le 02/04/2023

 

*Les purges staliniennes, durant la Grande Terreur, ont eu lieu entre août 1937 et novembre 1938. En un peu plus d’un an, quelque 1,5 million personnes sont arrêtées et 750 000 d’entre elles exécutées, rappelle l’historien Nicolas Werth, spécialiste de l’ex-URSS, dans le dossier de presse du film.

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