Déchets nucléaires : de quoi est-il question ?

La situation des déchets radioactifs est en l’état actuel insuffisamment maîtrisée. Cela résulte d’une longue histoire où soit la question des déchets était minimisée dans l’espoir de trouver une solution technique pour réduire leur radioactivité soit parce que la dangerosité d’une partie d’entre eux était sous-estimée. L’évolution de l’opinion, mais aussi l’importance prise par ces déchets a créé un problème qui ne peut plus être traité à la légère.

Nucléaire, chronique d’un désastre annoncé (suite)

La France développe une industrie nucléaire depuis près de 70 ans à des fins civiles ou militaires. Coté civil les gouvernements successifs ont parié sur l’électricité nucléaire, ce qui fait que la France possède actuellement le 2ème parc de centrales nucléaires après les USA. La part du nucléaire représente actuellement près de 75% de l’électricité produite en France, ce qui constitue un avantage selon les uns et une faiblesse selon les autres.
L’impact de ces déchets sur l’environnement varie selon leurs caractéristiques : principalement leur intensité de rayonnement et leur durée de vie. Leur importance exerce une pression de plus en plus forte au point que, depuis 2006 une procédure appelée PNGMDR
(Plan National de Gestion des Matières et Déchets Radioactifs) est mise en place pour organiser leur gestion.

D’où proviennent les déchets radioactifs ?

Les déchets issus de l’électronucléaire représentent près de 87 % . Car les 28 % présentés comme la part de la recherche, sont essentiellement destinés à la recherche expérimentale de nouveaux réacteurs plus performants.

Infographie supprimée suite au harcèlement d’une officine suisse

 

Les autres types de déchets radioactifs qui ne sont pas liés à la fabrication et à l’utilisation du combustible nécessaire aux centrales électronucléaires sont le fait d’activités militaires, d’activités industrielles diverses (hors production d’électricité) et d’utilisations médicales.

Quelles sont leurs caractéristiques ?

On distingue les déchets selon leur niveau de radioactivité et leur durée de vie appelée période radioactive qui corresponde au temps qu’il faut pour que l’activité du déchet soit diminuée de moitié. Ils sont répartis selon 6 catégories : HA ; MA-VL ; FA-VL ; FMA-VC ; TFA ; VC.

Les déchets HA sont 1 milliard de fois plus radioactifs que les déchets TFA et la période radioactive peut aller de plusiers millions d’années pour le HA-VL à quelques années pour les VC

Pour plus d’informations sur les catégories de déchets radioactifs :
https://www.andra.fr/les-dechets-radioactifs/tout-comprendre-sur-la-radioactivite/classification

Comment les déchets radioactifs sont-ils traités ?

Infographie supprimée suite au harcèlement d’une officine suisse

Les déchets faiblement radioactifs proviennent de la déconstruction des centrales nucléaires (gravats divers), ainsi que des activités industrielles qui emploient des matériaux radioactifs. Ils sont stockés dans une installation spécifique le Cires (Centre Industriel de Regroupement d’Entreposage et de Stockage) situé dans l’Aube.

A l’opposé les déchets MA-VL et HA  proviennent essentiellement de l’activité électronucléaire et posent de gros problèmes de stockage. C’est pour eux que l’ANDRA étudie une solution de stockage en profondeur (Cigeo / Bure) alors que d’autre pays, notamment les USA, on abandonné cette solution qui ne leur parait pas assez fiable dans la durée.

Où trouve-t-on des déchets radioactifs ?

Il faut ici expliquer quelques subtilités de langage :

  • il faut d’abord distinguer les matières radioactives des déchets radioactifs. Les matières sont des substances radioactives dont on considère qu’elles pourront servir ultérieurement. Les déchets sont des substances radioactives pour lesquelles aucun emploi n’est plus possible ou prévu…
  • il faut ensuite distinguer la notion d’entreposage et celle de stockage. L’entreposage est une solution provisoire d’hébergement de matières ou déchets radioactifs en attendant soit leur emploi pour les matières, soit leur stockage qui correspond à un hébergement de longue ou très longue durée.

On trouve des déchets radioactifs aux quatre coins de la France. Ces déchets, issus de l’histoire industrielle du nucléaire, sont plus ou moins protégés et plus ou moins contrôlés.  Les combustibles liés à l’activité électronucléaire ont une filière de traitement particulière, mais il y aussi tous les déchets qui n’ont pas toujours ou suffisamment fait l’objet d’un suivi organisé.

Ceux-ci sont issus de dépôts de déchets à radioactivité naturelle élevée, de l’activité minière (près de 250 gisements d’uranium ont été exploités en France), de l’usine de raffinage du minerai d’uranium (Orano / Malvési).
Ces déchets on été stockés dans les conditions les plus diverses : certains ont été déversés dans la nature, d’autres servent de remblais, d’autres sont enfouis en sub-surface et recouverts de matériaux divers dans une enceinte grillagée sans gardiennage particulier, d’autres, comme à Orano / Malvési, sont stockés dans des bassins plus ou moins étanches, etc.

 

Infographie supprimée suite au harcèlement d’une officine suisse

Les estimations sur la quantité de déchets ainsi déposés varient : dans le dossier de synthèse du dossier du maître d’ouvrage pour le débat public du PNGMRD ces déchets représenteraient 1,6 millions de m3, chiffre contesté par la CRIIRAD qui les estime à 200 millions de m3, en intégrant les résidus des activités minières, les déchets à radioactivité naturelle élevée, les résidus de l’activité de raffinage du minerai d’Uranium à Orano / Malvési. Au final les 1,6 millions de m3 seraient ceux gérés par l’Andra. Une partie du reste, notamment les déchets créés par le traitement du minerai  d’uranium est gérée par Orano, qui assure aussi une mission de surveillance sur certains sites de déblais uranifères.

En conclusion

La situation des déchets radioactifs est, en l’état actuel, insuffisamment maîtrisée. Cela résulte d’une longue histoire où :
– soit la question des déchets était minimisée dans l’espoir de trouver une solution technique pour réduire leur radioactivité
– soit parce que la dangerosité d’une partie d’entre eux était sous-estimée.
L’évolution de l’opinion, mais aussi l’importance de cette quantité de déchets, a créé un problème qui ne peut plus être traité à la légère. Il semble que la situation a été considérée comme suffisamment délicate par nos gouvernants pour qu’ils estiment qu’il ne fallait  plus laisser le public à l’écart des décisions à prendre. Dans cette perspective du 17 avril au 25 septembre 2019, une commission particulière du débat public, initiée par la CNDP, « viendra à la rencontre des citoyens, des associations, des représentants du secteur de l’énergie, des élus ou toute autre personne » pour connaître leur avis avant de définir un nouveau PNGMDR pour la période 2019 -2021 ( ?). Pourtant les jeux semblent déjà faits et les grands options de gestion arrêtées. Ainsi le gouvernement a confirmé que la stratégie de retraitement-recyclage du combustible nucléaire serait maintenue jusqu’en 2040, ainsi le projet Cigeo n’est pas remis en cause, etc. Alors consulter le public ou le conditionner à de futurs “sacrifices” ? C’est là toute la question !

Curly Mac Toole pour le Clairon de l’Atax,  le 19 / 06 / 2019

 

Sources :

Débat public plan national de gestion des matières et déchets radioactifs
https://pngmdr.debatpublic.fr/

Andra,  inventaire des sites de stockage :
https://inventaire.andra.fr/sites/default/files/documents/pdf/fr/inventaire_national-essentiels-2019.pdf

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