La démocratie participative n’est pas morte avec la Commune de Paris

Alors oui, la démocratie directe, espérée par les insurgés de la commune, a encore un bel avenir !

manifestation  (Image par Benjamin Bellier de Pixabay)

Il y a 150 ans la commune de Paris, revendiquait la démocratie directe comme système de gouvernement. La défaite de Sedan avait définitivement disqualifié l’élite du second empire aux yeux du peuple. Ces élites étaient vécues par ailleurs comme responsables de la misère d’un grand nombre de Français, exposés à la prolétarisation dans un pays en pleine industrialisation.
Comment alors ne pas rêver de maîtriser son destin ? La démocratie directe pouvait s’exercer dans un cadre familier, un cadre maîtrisé : celui d’un territoire à la géographie reconnue, car délimitée par les pratiques de la vie courante : l’arrondissement, le village, le quartier…Un système confédéral pourrait relier ces entités de base, et assurer les missions relevant  de l’État.
Tout cela se termina par un bain de sang : les « Versaillais » monarchistes l’emportèrent. Et si cela finit quand même en République, dotée d’un système de démocratie représentative, c’est juste parce que les monarchistes n’étaient pas d’accord sur le monarque à introniser.

Aujourd’hui ce n’est pas Sedan, mais la Covid 19 qui révèle au peuple que l’élite gouvernante, mise en scène pour son intelligence et ses compétences, se trouve incapable, non seulement d’assurer le bien être des Françaises et des Français, mais encore d’assurer leur protection. Pourtant elle prétend, alors que sa légitimité s’effiloche, s’introduire dans ce que nous avons de plus privé et nous dicter nos conduites.
Macron n’avait pas tout à fait tort lorsqu’il déclarait qu’on  était en guerre. L’état de guerre nous prive de la libre disposition de notre corps : nos déplacements sont contrôlés et dirigés et nos corps doivent se soumettre à des contraintes physiques d’autant moins tolérables qu’elles sont imposées par un pouvoir qui a perdu en grande partie sa crédibilité.  La comparaison entre guerre et pandémie Covid 19 s’arrête là, car les contraintes entre les 2 situations ne sont pas comparables dans leurs ampleurs et leurs conséquences. Mais ce qui, dans notre situation actuelle est comparable avec la condition des marsouins de Sedan ou des poilus de 14/18, c’est le ressentiment d’être soumis et dirigés dans un moment aussi  dramatique par une élite qui a failli.

De nos jours comme il y a 200 ans, lors de la Révolution de 1789, nombreux sont ceux qui pensent que le peuple ne peut pas se gouverner lui-même, que la démocratie directe est inapplicable à l’échelle d’un pays et qu’elle peut tout juste être expérimentée dans le cadre d’une petite commune et dans un temps limité, comme à Saillans (Drome). Ont-ils raison ? Ici et là la démocratie directe se pratique avec succès dans le milieu associatif, mais pas seulement : l’usage des NTIC qui se banalise, a au moins cette vertu de favoriser la consultation directe des individus. D’autre part, l’expérience récente de la Convention Citoyenne pour le Climat, montre que des citoyennes et des citoyens, aux origines et capacités diverses, tirés au sort, sont tout à fait capables, lorsqu’ils sont informés, de construire et proposer des mesures de gouvernement. 
De son côté, la démocratie représentative, présentée comme l’alternative raisonnable à la démocratie directe, ne fonctionne guère mieux en ce moment, lorsqu’on constate les dérives autocratiques en cours dans de nombreux pays, jusqu’alors réputés pour la qualité de leurs systèmes parlementaires.
Il est curieux de constater dans ces pays, la montée de l’arrogance de ceux qui pensent faire partie de l’élite gouvernante, alors que leurs chefs ne leur demandent que d’obéir et d’exécuter : représentent-t-ils encore leurs électeurs ou sont-ils juste mandataires de ceux qui les ont fait élire ?…  

La France, pays trop centralisé, est particulièrement exposée aux dérives autocratiques, d’autant plus que l’évolution des institutions de la 5ème république à renforcé le déséquilibre entre un pouvoir politique qui se concentre et des contre-pouvoirs de plus en plus affaiblis. Mais un pouvoir qui se concentre est aussi plus fragile dans la mesure où il devient une cible facile, exposée à toutes les pressions.
A l’inverse, la démocratie participative répartit les pouvoirs sur un grand nombre d’acteurs, c’est ce qui fait sa force. Sans prétendre être un système de gouvernement global, elle peut s’insérer dans tel ou tel espace de la vie politique d’un pays. Les votations en Suisse en sont un exemple, la Convention Citoyenne pour le Climat en est un autre : suscitée par E. Macron pour légitimer sa politique, il est à présent difficile voire impossible à ce dernier de passer à la trappe ce qui ne l’arrange pas dans les propositions des 150 citoyens tirés au sort !

Alors oui, la démocratie directe, espérée par les insurgés de la commune, a encore un bel avenir !

Hubert Reys pour le Clairon de l’Atax le 22/03/2021

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