Avenir de la filière nucléaire française : des décisions sont à prendre

Lors de la présentation de son bilan de l’année 2020, le jeudi 27 mai dernier, l’ASN (Autorité de sûreté nucléaire) a alerté les élus de l’Office Parlementaire d’Évaluation des Choix Scientifiques et Technologique (OPECST) sur la nécessité de prendre rapidement certaines décisions stratégiques sur l’avenir de la filière nucléaire française.

Centrale nucléaire Image par Stefan Kuhn de Pixabay

 

La question du prolongement de vie des centrales d’EDF

Selon Bernard Doroszczuk, l’ASN a donné son accord pour le prolongement de vie au delà des 40 ans pour 32 réacteurs de 900 mégawatts après évaluation par l’ASN, mais les moyens dont dispose actuellement la filière nucléaire française semblent insuffisants pour réaliser cette opération dans des délais respectueux de la règlementation. Rappelons qu’au bout de 40 ans, les réacteurs doivent subir une visite décennale sous le contrôle de l’ASN qui définit les travaux à réaliser. Or 4 visites décenales seront réalisées en 2021 et les travaux qui en découleront mobiliseront l’ensemble de la filière. Les travaux de génie civil seront multipliés par 3 et ceux de mécanique par 6, alors que les retards et problèmes de soudure de l’EPR de Flamanville révèlent une perte de compétence de certains acteurs.

Le grand carénage des réacteurs de 900 MW ne pourra être fait dans des conditions et délais satisfaisants, au vu des moyens actuellement disponibles.

La situation est d’autant plus complexe que les cuves de ces réacteurs de 900 MW présentent des signes de dégradation qui, selon B. Doroszczuk, ne permettraient pas de prolonger leur vie au-delà de 50 ans, situation qui aurait des conséquences sur l’approvisionnement électrique. Il ne serait pas souhaitable de prendre le risque de continuer la production avec des cuves de réacteurs dégradées et de sacrifier la sûreté des installations pour pallier les tensions sur le réseau électrique.

La question des déchets

Pour l’ASN le temps des études doit se terminer : il s’agit maintenant d’agir à la fois sur la gestion des métaux et gravats faiblement radioactifs, les déchets à faible activité et vie longue (FA-VL) et les déchets de haute activité (HA) et de moyenne activité à vie longue (MA-VL) destinés à Cigéo. Les besoins de stockage sont estimés à 2,3 millions de m3, alors que les capacités actuelles ne permettent d’envisager qu’un stockage de 900 000 m3. Il s’agit de décider de ce qui peut être recyclé et de ce qui doit être stocké dans de nouvelles infrastructures.

Autre décision à prendre selon B. Doroszczuk : le maintien ou l’abandon du retraitement du combustible nucléaire usé, alors que les installations d’Orano / La Hague arrivent en fin de vie. En cas d’abandon du retraitement, alors que les piscines de stockage de la Hague sont en voie de saturation, il faudra décider rapidement de la construction de nouvelles piscines d’entreposage. Ce problème, identifié depuis plus de 10 ans, n’a pas encore été résolu, un projet de piscine actuellement en cours d’élaboration ne devrait pas aboutir avant 2034 !

L’exposé du président de l’ASN sur le caractère urgent des choix et décisions à prendre contraste avec les annonces faites par le gouvernement sur la construction de nouveaux EPR, alors que la filière nucléaire française est mal en point. L’éventuelle restructuration d’EDF concoctée par Bercy avec le plan Hercule ou ses avatars rajoute encore à la confusion…

Curly Mac Toole pour le Clairon de l’Atax le 20/06/2021

 

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