Usine Orano / Malvési de Narbonne : coup dur pour le projet d’incinérateur de déchets radioactifs nitratés

Dans une période où les gouvernements macronistes successifs, au prétexte d’accélérer la réalisation de certains projets d’aménagement, particulièrement dans le domaine de l’énergie, tendent à réduire dans les procédures d’instruction la consultation du public au profit du renforcement du rôle décisionnel des préfets,  le dossier TDN constitue un contrexemple  au bien fondé de cette politique.

Depuis plus de 6 ans, 2 associations Narbonnaise RUBRESUS et COL.E.R.E. livrent bataille contre le projet de l’industriel ORANO  d’incinérer les déchets radioactifs nitratés stockés dans son usine de Malvési/Narbonne classée INB (installation nucléaire de base)  et SEVESO  “seuil haut”. Cet incinérateur serait situé au cœur de son usine à moins de 3 km du centre de la ville de Narbonne située sous les vents dominants. Il constituerait, selon l’exploitant ORANO, la solution pour traiter les 400.000 m3 de déchets accumulés en 60 ans dans des bassins à ciel ouvert.

Malgré les nombreuses interventions des 2 associations qui se sont appuyées sur un réseau d’experts indépendants, dont la CRIIRAD, qui soulignaient : « les énormes incertitudes technologiques de cet incinérateur expérimental hyper complexe (four à lit fluidisé à charbon et hydrogène), les émissions supplémentaires de polluants atmosphériques (oxydes d’azote NOx, radioactivité, fumées et gaz, …), les consommations extravagantes d’eau, d’énergie et de réactifs chimiques. » , le préfet de l’Aude Alain Thirion prenait le 8 novembre 2017 un arrêté d’autorisation d’exploitation  au terme d’une enquête publique aux méthodes discutables.

Après un premier rejet en 2019 de leur recours en annulation de cet arrêté par le TA (Tribunal Administratif de Montpellier) les associations RUBRESUS ert COL.E.R.E. ont introduit en décembre 2019 un recours conjoint devant la Cour administrative d’appel de Marseille.

Le rapporteur public chargé d’analyser le dossier de ce recours à présenté au tribunal des conclusions défavorables au maintien de l’arrêté préfectoral en relevant des manques et irrégularités dans le dossier présenté par ORANO et instruit par les services du préfet, notamment :

  • insuffisance de l’étude d’impact, 
  • absence d’étude de pollution des sols du site, 
  • non-respect par la préfecture de l’indépendance de l’avis l’autorité environnementale.

Verbatim de l’avis du rapporteur public :

Motifs, notamment :

-Le projet a été instruit pour le préfet de l’Aude par le service de l’unité interdépartementale Aude-Pyrénées Orientales de la direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement Occitanie et l’avis environnemental du 29 avril 2016 émis par le préfet de région a été préparé par ce même service. Par conséquent, l’avis environnemental n’a pas été rendu par une entité interne disposant d’une autonomie réelle à l’égard de l’auteur de la décision attaquée (CE 5 février 2020 Association “Des évêques aux cordeliers” et autres n° 425451 en B).

-Insuffisance de l’étude d’impact s’agissant du stockage, du transport et du traitement des déchets.

-Absence d’étude sur la pollution des sols prévue par les dispositions de l’article L. 512-18 du code de l’environnement non compensée par une étude équivalente dans l’étude d’impact.

-Aucun autre moyen n’est fondé.

Par conséquent : mise en œuvre du dispositif de régularisation prévu par l’article L.181-18 du code de l’environnement. ».

L’avis du rapporteur public a été présenté à la Cour Administrative d’Appel le 7 octobre dernier. Ce rapporteur qui est indépendant et ne prend pas part à la décision des juges propose  au tribunal :

« Sens des conclusions et moyens ou causes retenus :

– Il est sursis à statuer sur la requête jusqu’à ce que le préfet de l’Aude ait procédé à la transmission d’un arrêté de régularisation après réalisation par le pétitionnaire d’une analyse complémentaire de l’étude d’impact s’agissant du stockage, du transport et du traitement des déchets, ainsi que d’un état de pollution des sols portant sur l’intégralité du site et transmission d’un avis régulier de l’autorité environnementale compétente, le tout dans le délai de douze mois à compter de la notification de l’arrêt à intervenir, tous droits et conclusions des parties sur lesquels il n’est pas statué dans l’arrêt étant réservés jusqu’à la fin de l’instance.

-Le préfet de l’Aude fournira à la Cour (greffe de la 7ème chambre), au fur et à mesure de leur accomplissement, les actes entrepris en vue de la régularisation exposée au point précédent.

-La poursuite de l’exploitation du site est autorisée dans l’attente de la mesure de régularisation dans le respect de l’ensemble des prescriptions applicables à cette exploitation hors projet TDN ;

-Tous droits et conclusions des parties sur lesquels il n’est pas statué dans l’arrêt sont réservés jusqu’à la fin de l’instance.

Le jugement de la cour administrative d’appel sera rendu dans 15 jours

Dès à présent on peut considérer que l’action ds RUBRESUS, TCNA, COL.E.R.E, SORTIR DU NUCLÉAIRE, GREENPEACE,  qui s’opposent à ce projet d’incinérateur a débouché sur un résultat positif. Au delà de TDN /Orano, dans une période où les gouvernements macronistes successifs, au prétexte d’accélérer la réalisation de certains projets d’aménagement, particulièrement dans le domaine de l’énergie, tendent à réduire dans les procédures d’instruction la consultation du public au profit du renforcement du rôle décisionnel des préfets,  le dossier TDN constitue un contrexemple  au bien fondé de cette politique.

A présent que vont faire le préfet et ses services ? Que va faire ORANO ? Vont-ils engager un nouveau bras de fer avec la société civile ? Le projet TDN sera-t-il abandonné ?

La rédaction du Clairon de l’Atax le 10/10/2022

Merci à André Bories /RUBRESUS  pour les documents fournis

 

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Publié par La Rédaction du Clairon de l'Atax

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