Herbicides : tensions entre le ministre de l’agriculture et l’ANSES autour de l’emploi du S-métolachlore

De quoi s’agit-il ?

Le S-métolachlore est un puissant herbicide agricole essentiellement commercialisé par la puissante firme allemande Syngenta. Il est largement employé dans les cultures de tournesol, de maïs et de soja.  Après épandage, il s’infiltre dans le sol et se transforme en dérivés chimiques appelés « métabolites ». L’Agence européenne des produits chimiques (ECHA) a proposé en juin 2022 de classer le S-métolachlore comme cancérogène probable.

Épandage (Image par Th G de Pixabay)

Une procédure de retrait amorcée

Le 15 février 2023, l’Agence de sécurité sanitaire (Anses) annonçait qu’elle mettait en œuvre une procédure de retrait concernant les produits phytopharmaceutiques à base de S-métolachlore. Cette décision faisait suite à une expertise sur le risque de contamination des eaux souterraines, où l’ANSES avait constaté que les concentrations de trois métabolites de cette substance étaient supérieures aux normes sur la qualité des eaux, définies par la législation européenne.

Une levée de boucliers de l’agro-industrie

Cette décision de l’Anses a provoqué de vives réactions de la part de la FNSEA qui représente ce type d’agriculture et pèse lourd dans les décisions du gouvernement. C’est ainsi que le ministre de l’Agriculture Marc Fresneau s’exprimant le 30 mars 2023 lors du congrès de la FNSEA avait souhaité rassurer les congressistes en déclarant : « Je viens de demander à l’Anses une réévaluation de sa décision sur le S-métolachlore, parce que cette décision n’est pas alignée sur le calendrier européen et qu’elle tombe sans alternatives crédibles ».
Favorablement accueillie par la FNSEA et les tenants de l’agro-industrie, cette déclaration avait cette fois soulevé un tollé chez les élus d’opposition, mais aussi de la part des associations de défense de l’environnement. Pour sa part Génération Écologie considérait cette déclaration  ministérielle comme une remise en cause de l’indépendance de l’Anses : « Il s’agit ni plus ni moins que de mettre en cause l’indépendance et le travail scientifique et règlementaire de l’Agence pour lui demander d’obéir à un ordre politique », tandis que la FNSEA, en la personne de sa présidente, préconisait la subordination des faits scientifiques aux décisions politiques…

L’Anses tient bon

C’est finalement ce jeudi 20 avri,l que la décision d’interdiction par l’Anses est tombée, contre les avis du ministre de l’agriculture Marc Fresneau et de la FNSEA. Cette interdiction concerne les principaux usages du S-métolachlore. Elle s’est immédiatement concrétisée par le retrait d’une dizaine d’autorisations de mise sur le marché (AMM) de produits à base de S-métolachlore. Cependant la vente et la distribution de ces produits restera autorisée jusqu’au 20 octobre 2023 et les stocks existants pourront être utilisés jusqu’au 30 octobre 2024.

Louise B. Velpeau pour le Clairon de l’Atax le 20/04/2023

 

 

 

Print Friendly, PDF & Email

Laisser un commentaire