Quand j’entends le mot «audit» je piaffe !

Comment échapper à cette inlassable reproduction du même ?

moineau (Image séance aviaire de Pixabay)

Ils nous refont une fois de plus le coup éculé de l’Audit ! De l’exécutif communal jusqu’au national, lorsqu’une nouvelle équipe se met en place et surtout quand elle est issue d’une opposition à un ancien exécutif, le recours à l’audit devient un moyen commode de s’exonérer des promesses qu’on a faites dans l’espoir de parvenir au pouvoir.
L’audit est plus ou moins sérieux, qu’il soit fait par un cabinet réputé ″compétent″ ou en interne par le nouvel exécutif. Le scénario est toujours le même, à quelques modulations ou tonalités près : on découvre le ″pot aux roses″, la vérité cachée par l’ancienne équipe. Et cette vérité est simple et brutale : on n’a pas l’argent nécessaire pour tenir nos promesses. Celles-ci seront donc différées dans leur réalisation, ou atténuées, ou plus ou moins discrètement gommées…

Ce qui dans ces audits est retenu, largement diffusé et commenté : ce sont les chiffres, la vérité comptable, incontestable, incontournable. Elle impose des chiffres qui font écran à toute autre analyse des causes, des échecs ou défaillances de l’ancienne équipe : était-ce un problème de choix stratégique, de gouvernance, d’organisation, etc. ? Tout cela passe à la trappe, quitte à ce que la nouvelle équipe refasse les mêmes erreurs que l’ancienne.

Les chiffres sont très forts : dans les sondages ils portent la parole du peuple bien mieux que celui-ci ne le ferait de lui-même, ils rendent cette parole, par eux médiée, acceptable aux oreilles des dirigeants, ils bardent de certitudes les discours des experts invités dans les médias de formatage, ils jugulent les aspirations au bien vivre du peuple par leurs certitudes arithmétiques, comme leur fameux « 3% du PIB » de droit divin. Les chiffres nous rassurent, nous empêchent de penser au gouffre vertigineux que le néolibéralisme creuse sous nos pieds.
Comment échapper à cette inlassable reproduction du même ?

Et puis il y a Macron, l’homme qui « sait » : il décide de dissoudre l’Assemblée Nationale, le cœur du réacteur démocratique français.

Sait-il les effets de cette dissolution sur le gouvernement du pays, sur son économie ? Sait-il les conséquences de cette dissolution en Europe ou dans les institutions internationales ? Sait-il tout simplement quel sera l’impact de cette dissolution sur les jeux olympiques qui ont actuellement, malgré une ″com d’enfer″, bien du mal à susciter l’enthousiasme attendu et donc les recettes escomptées ?

Les exégètes du scandale de cette dissolution en cherchent la raison : ils imaginent un coup stratégique d’une virtuosité inédite, Un coup de billard politique à 5 bandes, dont la subtilité échapperait à l’intelligence commune, ou au contraire, ils y voient l’erreur d’un autocrate qui, comme tous ses homologues, s’est progressivement isolé du réel.
Peu importe, ce dont témoigne Macron depuis son arrivée au pouvoir en 2017, c’est de sa difficulté à reconnaître ce qui vient à lui, c’est-à-dire l’altérité. Il se pense disposer d’un savoir absolu où le doute n’a pas sa place. Cette certitude fait que tout ce qui vient de l’Autre et le contredit ne peut qu’être erroné et donc à combattre par la rhétorique, sinon par la répression.
Dans ce monde-là, il n’y a pas d’empathie : les gens des « kwassa kawassa », ceux qui ne traversent pas la rue pour chercher du travail, ou ceux qui ne sont rien, ne sont pas considérés dans leur humanité, mais comme les éléments d’un système dysfonctionnel qu’il faut corriger.  Alors on ne débat pas car on n’a pas de comptes à rendre aux éléments d’un système, quel intérêt ? Ceux-là, on les organise et on les guide puisqu’on se croit premier de cordée.
Dans le monde à Macron, on discute et débat un peu mais surtout avec celles et ceux qui sont montés avec le chef aux ″affaires de l’État″, qui lui ont fait allégeance et qui gèrent les fragments de pouvoir que leur laissent Macron et son cabinet. Elles et ils sont les mêmes, à quelques détails près, ces Barbie et Ken dynamiques et branchés du néolibéralisme, aussi conscients de leur valeur, aussi infirmes du doute, dont l’empathie se limite au périmètre de leur caste… et encore, il faut alors que ce soit ″gagnant/gagnant″. Mais ceux-la sont aussi le dos au mur, puisque la plupart d’entre eux n’a d’autre métier que la politique. Alors peu importe ce que l’on raconte au peuple, peu importe les revirements qui se font au gré des opportunités : la cohérence se trouve dans le service du capital.
Et nous voilà ce soir : demain le Rassemblement national et son jeune premier sinistre seront-ils plus efficaces que les macronistes pour défendre les intérêts du CAC 40 ? Ou au contraire, le Front populaire aura-t-il réussi à terrasser l’hydre brune, malgré la présence en son sein de quelques néolibéraux sournois ?

Comment sortir de ce carrousel qui semble tourner sans fin ? Il faut pourtant essayer : cela implique de changer radicalement les instituions de la Vème République. Elle a fait son temps, elle n’est plus adaptée à l’évolution de notre société et nous fait désormais plus de mal que de bien.
Il faudra d’abord changer de Constitution : ceux qui prétendent gouverner demain avec juste l’intention de toiletter les instituions de la 5ème République, peuvent-ils encore se prétendre soucieux du bien commun ?

Hubert Reys pour le Clairon de l’Atax le 21/06/2024

 

4 commentaires

BURGER Catherine

On est éberlué, interdit par ce caprice d’enfant gâté de Macron et quand on voit le chaos qu’engendre sa brutale décision on peut légitimement se demander si ses facultés mentales sont intactes.
Hier soir jeudi 27/06 à l’excellente et brève émission d’Arte « 28 minutes », Elisabeth Quin recevait Pierre Rosanvallon, historien et sociologue, qui ne masquait pas son angoisse devant ces élections « incroyables » mais en analysait avec pertinence les raisons.

La véritable personnalité de Macron se dévoile pour un nombre grandissant de Français. Elle contraste avec ce qui a été « vendu » aux citoyens de puis 2017, ce qui constitue de plus en plus un rejet de son autorité

patrick chevalier

Brillant article, qui devrait figurer à la une de bien des organes de presse. Ce ne sera malheureusement pas le cas pourtant, puisque la parole de gauche, ici puissante, charpentée et riche, est aujourd’hui considérée de façon unilatérale comme sortant de la bouche d’incapables, complotistes, ennemis de la république, antisémites et autres, bref de populistes illuminés et à éviter à tout prix alors que son discours est le plus lumineux qui soit et que les gens qui la défendent aient toute leur intelligence, avec ,ce que n’ont pas les autres, la bienveillance en plus.
Sur le plan économique, qui dit que la politique de la demande est plus porteuse d’espoir que l’austérité et la hantise de la dette? Personne, ou presque. Qui dénonce encore le scandale du glissement du partage de la richesse mondiale depuis plus de trente ans? Personne, sauf les syndicats, qui voient inlassablement les salaires quasi bloqués et le dividendes s’envoler. C’est près de 30% de cette richesse qui est passé du travail au capital. Qui s’en offusque? Qui s’en étrangle? Juste des gilets jaunes, ces sans le sou irresponsables! Personne ne les a écoutés, ils ne le pardonneront pas.
Qui dit effectivement que cette cinquième république aujourd’hui est tout simplement ridicule? A poil? A côté de la plaque et parfaitement ingérable? Que ce qu’il faut au pays ce sont de vrais états généraux, redonnant effectivement toute sa place à l’humain. Pas le numéro dans la case adéquate, L’HUMAIN! Pas le PIB mais le bonheur, l’entente, la cohésion, la fraternité.
Réponse: la gauche et seulement elle. Alors on la traite d’irresponsable utopiste. Ainsi va le monde!

Merci pour ce commentaire réconfortant :suivre de près l’actualité est parfois décourageant lorsqu’on mesure d’une part la puissance des vagues de désinformation qui submergent actuellement la France, lorsqu’on constate lors des tractages leur efficacité sur le public, mais aussi quand on suit les luttes intestines au Nouveau Front Populaire et la répartition par les instances nationales des candidatures. Malgré cela la cause est sacrée, il s’agit de dépasser tout cela et de combattre le RN même au prix de l’élection de néolibéraux opportunistes drappés dans les couleurs de la gauche ! On ne lâche rien !

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