Auteur Gabriel Tallent / éditeur Galimeister 11,70 €
Turtle c’est une fille, elle a 14 ans, elle habite en Californie, mais la cote nord, la sauvage, où les forêts tombent tout à coup dans les criques battues par lezs rouleaux du Pacifique.
Turtle elle n’est pas belle, enfin pas comme les boudins bodybuildés qui hantent les concours de beauté, là bas au sud, de Malibu à San Diego. Mais à la côtoyer on découvre qu’elle est intéressante, mieux que ça attirante. Elle fait des trucs que les pétasses, si chichiteuses, si conformes et si prévisibles du collège, ne font pas. Par exemple, elle fait des cartons d’une précision inouïe avec le Sig Sauer qu’elle porte sur elle et depuis l’âge de 4 ans elle tire à la carabine. En plus elle connait la forêt comme sa poche : chaque plante, chaque bruit chaque odeur. Faut dire qu’elle habite dans cette forêt une bicoque pourrie que son père bricole de temps en temps, pas assez…
Il est spécial son père : d’abord il pense que la société va bientôt se casser la gueule et c’est pour ça qu’il a choisi de se retirer au milieu de la forêt et qu’il a appris à Turtle à se défendre les armes à la main.
Des armes il en a beaucoup à la maison et Turtle, il l’aime énormément, c’est tout ce qui lui reste, vu que sa femme, la mère de Turtle est partie dans l’océan, juste en bas là, au bout de la forêt : un suicide peut être. Alors sa fille à présent c’est comme sa femme, un peu….
Faut dire qu’il est étrange ce père, il lit Marc Aurèle et porte des jeans dégueulasse et de temps en temps il part.. En plus, il laisse végéter son propre père, le papy de Turtle en bas, à la lisère de la forêt, seul avec son chien dans une caravane pourrie…
Mais voilà, Turtle elle est pas bonne à l’école, elle ne s’intègre pas bien, ça inquiète ses profs et son papy qui voudraient qu’elle aie la vie des ados de son âge, ils pensent que le papa de Turtle déconne, mais Turtle aime son papa. Elle veut pas qu’il aie des histoires avec tous ces gens qui ne sont pas non plus vraiment conformes aux standards de la classe moyenne américaine, qui sont un peu hippies, un peu anars, mais moins que le papa de Turtle qui aime sa fille et qui ne veut pas que tous ces gens la corrompent, la pourrissent…
Turtle, ç’est “tortue” en Français. Pour beaucoup de peuples du Pacifique, la tortue est le symbole de la sagesse, pas celle, certes respectable, qui s’acquiert en tournant d’une main diaphane les pages d’un livre, celle du sage qui sait très précisément où est sa place dans la nature…
My Absolute Darling est un livre d’une puissance incandescente, qui enchaine des ambiances avec une précision inouïe, au point d’en être poétique. On passe de la tendresse à l’horreur, de la quiétude à la tempête, tout simplement emporté par ce récit, d’où on ne sort même pas à la fin du livre.
Hubert Reys pour le Clairon de l’Atax le 22/11/2020