Le logement, ce mal aimé du gouvernement ?

La relance de la production de logements sociaux n'est pas incompatible avec la limitation de l'artificialisation des sols

Diogène, ancètre des mal logés (Image par Clker-Free-Vector-Images de Pixabay)

Nous sommes à 8 jours de la fin de la trêve hivernale. Dans 9 jours les procédures d’expulsion de locataires pourront reprendre. Dans le même temps, la crise de l’immobilier ne cesse de se développer puisqu’ actuellement en France, 2,6 millions de ménages sont en attente d’un logement social, soit près de 200.000 de plus qu’en 2022. (1). A cela il faut ajouter près de 4 millions de ménages mal logés (2). Comment faire pour produire les 400.000 logements /an qui, selon les calculs de la Fondation Abbé Pierre, seraient nécessaires pour réduire la crise ? En sus de la question des investissements à mobiliser, se pose le problème de la compatibilité entre la production massive de logements pour résoudre la crise avec la lutte contre la crise environnementale et particulièrement les restrictions à l’artificialisation des sols.

En effet, l’extension urbaine et péri-urbaine est fortement consommatrice de sols. Selon le rapport précité : « La superficie des espaces artificialisés a augmenté de 72 % entre 1982 et 2018 en France métropolitaine tandis que la population n’a crû que de 19 %. ». Or les effets de cette artificialisation sur l’environnement se font de plus en plus sentir : atteintes à la biodiversité, inondations, zones de chaleur et de surexposition au soleil, impacts sur le cadre bâti, sur la santé, sur les modes de vie, etc.

Pourtant des solutions existent pour réduire cette bétonisation du sol, tout en créant de nouveaux  logements.

Tout d’abord la mise à disposition de logements vacants (actuellement 3,1 millions), ensuite en construisant dans les espaces urbains interstitiels et les « dents creuses.
Une autre piste pour créer des logements correspondant à la demande consiste à transformés des logements sociaux inoccupés ou sous-occupés en logements plus petits mais correspondant à la demande (3) Il s’agit ensuite de changer le modèle invasif de la construction pavillonnaire péri-urbaine qui présente la densité la plus faible d’habitants / km² et d’évoluer vers des formes bâties aux capacités de logement plus importantes. Ce changement nécessaire est cependant difficile à mettre en œuvre et nécessitera une intervention politique déterminée et menée sur le long terme : d’une part parce que la maison individuelle correspond aux aspirations de beaucoup de Français, d’autre part parce que son mode de production (possibilité d’auto-construction partielle ou totale) rend le pavillon accessible à des couches sociales modestes, enfin parce qu’il mobilise une part importante de la filière du BTP constituée de PME, d’artisans, de commerces de matériaux de construction et de bricolage, etc. au poids économique non-négligeable. Ici encore, il existe des solutions architecturales qui ont fait leurs preuves et qui permettent de ménager les aspirations individualistes des ménages et les économies en foncier .

 Mais la question du logement ne semble pas prise en compte par le gouvernement actuel dans la mise en œuvre du Plan national d’adaptation au changement climatique.

Selon un rapport récent de la Cour des comptes (chargée d’évaluer les politiques publiques), tout reste à faire pour protéger les logements contre les aléas climatiques. La question de la climatisation des logements est mal traitée par des solutions à court terme et mal adaptées à l’évolution du climat. De plus l’évaluation des coûts occasionnés par l’adaptation aux nouvelles conditions climatiques n’est pas abordée alors qu’actuellement 12 millions de Français vivent en situation de précarité énergétique.
Le Plan de rénovation énergétique qui devait être « le chantier du siècle » est décrit comme peu efficace dans ses résultats et les aides publiques qui lui ont été consacrées, semblent avoir favorisé un saupoudrage de travaux partiels, peu efficaces en lieu et place de ″rénovations d’ensemble″ qui assurent de réelles performances énergétiques…

L’arrivée du nouveau ministre Kasbarian ne semble pas provoquer une amélioration de la politique de rénovation énergétique qui a été, selon la Cour des comptes, l’occasion de fraudes massives. Mais par contre, au prétexte de l’argument néolibéral bien connu de ″simplification″, les nouvelles dispositions gouvernementales font la part belle à l’industrie du BTP (4)

Hubert Reys pour le Clairon de l’Atax le 22/03/2024

 

 

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Notes
  1. chiffres de l’Union sociale pour l’habitat (USH)[]
  2. Selon un rapport réalisé conjointement par la Fondation pour la nature et l’homme (FNH) et la Fondation Abbé Pierre ; https://www.fondation-abbe-pierre.fr/sites/default/files/2024-03/FNH-FAP_Rapport%20ZAN-Logement.pdf[]
  3. cf. : voir dans cette édition l’article intitulé : « Restructurer l’offre HLM par la réhabilitation-restructuration » https://le-clairon-nouveau.fr/wordpress/blog/2024/03/23/une-reponse-particuliere-a-la-crise-du-logement-social/[]
  4. https://www.mediapart.fr/journal/ecologie/180324/renovation-energetique-les-lobbys-du-btp-ont-eu-la-peau-de-la-reformeutm_source=ecologie20240320180008&utm_medium=&utm_campaign=&utm_content=&utm_term=&xtor=EREC-83-[ECOLOGIE]-ecologie-20240320-180008%20%20&M_BT=79999800288[]
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1 commentaire

BURGER Catherine

comment espérer que ce gouvernement à bout de course puisse prendre les mesures énumérées dans l’éditorial, forcément impopulaires quand on connaît l’attachement viscéral des Français à la maison individuelle dans un lotissement à la périphérie des villages

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