“Le hussard sur le toit” – Jean Giono

“Actuellement, il est préférable de se tenir loin les uns des autres.” (P. 432)
Une recommandation déjà proclamée dans la Provence de 1830. Une autre épidémie sévissait alors. C’était le choléra qui décimait villes et campagnes. Il n’y avait pas de vaccin, pas de service de santé…On vomissait, et on crevait.

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Le bon sens et surtout une forme d’atavisme populaire recommandaient de se tenir éloigné des malades et des corps. Alors on mettait à contribution les forçats, qui visitaient les maisons, récupéraient les corps laissés sur les pas-de-porte, ou abandonnés dans les étages, entassaient les cadavres sur des charrettes et de gigantesques brasiers faisaient le reste.
À leur tour, ils crevaient et alimentaient les flammes.
Jean Giono nous conte ce choléra qui alors faisait des ravages, tuait en quelques heures, riches et pauvres. On ne savait pas d’où il venait, ni pour combien de temps ou comment on aurait à s’en protéger…
Il en fait le cadre d’un roman mêlant à la fois la grande et petite histoire, l’amour, les combats au sabre, la promenade dans cette Provence originelle, pas encore défigurée, la mort qui rode et frappe sans discernement.
Bref, le cadre d’un film de cap et d’épée…Rapeneau le fit, presque cinquante ans plus tard.
Angelo est un colonel des hussards…il a 25 ans. “Il était de ces hommes qui ont vingt-cinq ans pendant cinquante ans.”
C’est bien jeune pour être colonel….Sauf si maman a acheté ce titre. Il fuit la prison, car il a tué en duel un officier autrichien. Il sait manier le sabre et le pistolet et s’en servir contre les soldats, garants du confinement et de la quarantaine.
Et interdisant tout déplacement !
Alors que nombreux sont ceux qui se vident de leur mousse blanche, qui se précède les taches noires sur le corps et les membres et, ceci avant que la mort fasse le reste, lui résiste, et aide bonnes-sœurs et curés à enlever les cadavres des rues et à alimenter les brasiers.
Et pour se protéger il se réfugiera un temps sur les toits, position privilégiée pour observer la ville et notre monde.
Il rencontrera la belle, déjà mariée à un vieux bonhomme…avec laquelle il fera un bout de chemin pour la raccompagner chez elle et pour rejoindre d’autres combattants de la liberté.
Bref un roman détente, présentant l’intérêt de découvrir la Provence sous un autre jour, en d’autres temps, un roman lu, alors que nous étions confinés à la maison par un méchant virus.
Mais également un roman qui permet à Giono de décrire la nature humaine, les braves gens inoffensifs, les riches, les profiteurs, les salauds, les constantes en périodes d’épidémie.
La maladie, la mort qui rode, révèlent le caractère des hommes, leur courage, leur lâcheté, leur âpreté au gain, leur désir d’aider mais aussi celui de profiter des détresses d’autrui.
Les époques se suivent, la Provence de 1830, Giono de 1951, et notre actualité se télescopent pour notre bonheur de lecteur
Il m’a permis de passer d’agréables moments bien préférables aux fadaises et c….en tous genres que nos télés nous imposent en période de confinement.
Masochisme ? Non désir seulement de mourir dans longtemps, heureux et le moins idiot possible!

Jean Pierre Vialle pour le Clairon de l’Atax le 22/06/2020

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