La canicule de cet été s’efface progressivement dans nos mémoires harcelées par une information frénétique qui cherche à capter un public à l’attention de plus en plus flottante. On peut espérer que cette chaleur exceptionnelle aura au moins convaincu le plus grand nombre de la réalité de la crise climatique. Mais une fois cela compris, combien d’entre nous conçoivent que cette réalité n’est pas statique, mais que le changement climatique est un processus en cours de développement, incoercible, qui va impacter à jamais toutes les sociétés humaines et bouleverser leurs modes de fonctionnement ?
Incendie la nuit Image par Valter Cirillo de Pixabay
Les scientifiques font des projections sur la fonte des glaces, la sècheresse, les méga feux, la hausse du niveau des mers, les divers aléas météorologiques, puis les révisent, les corrigent, esquissent des scénarios sur le devenir de telle ou telle partie du monde ; pourtant nous avons du mal à nous représenter ce futur évolutif et son caractère inexorable.
C’est peut être pour cela que nous tardons à nous mobiliser et à changer radicalement nos comportements pour ralentir, voire atténuer, les effets de cette crise et que, de leur côté, ceux qui nous gouvernent hésitent à s’engager dans des politiques à la hauteur des enjeux, de peur de perdre leur crédit auprès de l’opinion et d’être démis.
Mais il y a des réalités auxquelles on ne peut se dérober : les méga feux et les inondations hors normes ont provoqué de la part des pouvoirs publics des mesures restrictives des libertés individuelles (déplacements de population, zones interdites, etc.). Le confinement lors de la pandémie a supprimé temporairement la liberté de circuler. Ces restrictions vont nécessairement s’accroitre avec l’aggravation de la crise climatique, soit à titre préventif, soit à titre curatif et, lorsque l’on voit le tollé provoqué par la simple proposition de restreindre de 10 km/h la vitesse sur les routes et autoroutes, on peut se demander quelles seront les réactions lorsqu’il s’agira d’interdire et de réprimer certaines habitudes ou certaines pratiques traditionnelles.
Le risque est grand de voir l’évolution climatique s’accompagner d’une montée générale de la violence. Les conditions sont alors réunies pour qu’émergent, au prétexte d’un retour à l’ordre et de la « sécurité », des régimes ultra-autoritaires, voire dictatoriaux, réputés résoudre les problèmes mais dont l’inefficacité est largement documentée.
L’exemple français du traitement politique de la pandémie illustre, toutes proportions gardées, cette possibilité de glissement politique. Ainsi dans le cadre du régime présidentiel qui nous gouverne, E. Macron président et chef des armées déclare la pandémie comme une situation de guerre et décide d’instituer un « conseil de défense » qu’il compose à sa guise et qui échappe à tout contrôle parlementaire. C’est en s’appuyant sur ce conseil et non sur les institutions médicales officielles, que seront prises les différentes décisions de lutte contre la pandémie. Le résultat est loin d’être convaincant : on se souvient des erreurs commises (masques) et des prédicats erronés (fin des vagues de la pandémie)…
Dans une situation qui remet en cause aussi radicalement notre futur et celui du vivant sur terre, les décisions ne peuvent pas relever d’un pouvoir limité à une personne, une oligarchie, une élite, faute de quoi elles seront contre-productives, génératrices de violence parce qu’injustes, partiales et très souvent incompréhensibles parce qu’ ourdies par quelques satrapes liés par des intérêts particuliers. Il s’agit pour être efficaces que les responsabilités soient prises par le plus grand nombre, ce qui constitue le principe de toute démocratie. Un peuple renseigné par une information honnête, complète, objective et accessible, prendra dans le cadre d’un débat démocratique, des décisions auxquelles il pourra consentir et qu’il mettra œuvre plus efficacement que tout ce qui pourrait lui être imposé sans son consentement. Et il s’agit bien que dès maintenant, tous ensembles, nous évoluions rapidement et radicalement dans nos comportements.
Aller vers plus de démocratie ne semble pas être le chemin pris actuellement par E. Macron. Les législatives de 2022 ne lui ont pas donné une majorité parlementaire à ses ordres. Il tente donc de contourner le parlement en employant certains outils politiques susceptibles de présenter une apparence de démocratie sur lesquels il feindra de s’appuyer pour faire passer ses décisions. Faire participer des gens à une consultation mais ne pas les faire participer à l’élaboration de la décision : la Convention Citoyenne pour le Climat en 2019/2020 en est une parfaite illustration.
Les référendums peuvent servir de la même manière à justifier des décisions prises en dehors de tout processus démocratique, lorsque le prince choisit les questions posées au peuple, contrôle les informations censées l’informer et les circonstances dans lesquelles se déroulera la consultation. (Cf. : Poutine et les référendums actuels sur le rattachement du Donbass à la Russie). Imaginons qu’à l’heure actuelle un référendum soit habilement organisé par nos gouvernants sur la question des énergies. Il s’agirait de choisir entre énergies « propres » et énergies « pas chères », il n’est pas sûr que les considérations climatiques l’emportent dans les choix : ça tombe bien nous sommes en retard dans le développement des énergies renouvelables…
La question de l’organisation politique de notre pays est indissociable de la lutte contre le changement climatique. Pourtant, les projets d’un changement significatif de nos institutions ne semblent pas constituer une priorité pour nos gouvernants. En dehors des propositions d’une assemblée constituante élaborées dans le programme de LFI, les autres partis politiques semblent actuellement plutôt opter pour un toilettage de l’existant.
Nous sommes à un moment crucial : dans cette ère de changement climatique que nous subissons, le fonctionnement démocratique de nos sociétés est un besoin vital. Seules des institutions démocratiques nous permettront d’affronter collectivement les aléas majeurs qui nous menacent et d’atténuer les violences sociales et politiques induites par ces catastrophes majeures.
Hubert Reys pour le Clairon de l’Atax le 21/09/2022
Tout à fait d’accord avec toi. mais j’ai l’impression qu’on part « fleur au fusil » dans une direction, sans forcément en peser les conséquences….d’accord pour le tout électrique, mais quid des réactions des antinucléaires. Ok pour des capteurs solaires, des batteries mais quelles en seront les conséquences en terme de pollution, de déchets, lors de leur fabrication ou de leur arrêt. A-t-on les réponses ?
Les questions ne manquent pas, La seule question qui résume tout, selon moi, est peut-être celle-ci : « est ce que notre petite boule dans l’univers peut supporter autant d’habitants, répondre à leurs besoins…et aux lubies de certains de leurs dirigeants, à leurs changements de caps…et au besoin de paix …besoin qui n’est peut-être pas partagés par tous
Merci Jean Pierre de ces remarques, le drame c’est qu’actuellement on nage dans l’incohérence et plutôt que de réfléchir à une programmation cohérente des mesures qui pourront être efficaces contre la crise climatique, ceux qui nous gouvernent essayent de retarder au maximum des changements qui ne leur profiteront pas.
Clairement exposé, bien. Merci