France – 2021 – 2h30
Un film de Xavier Giannoli avec Benjamin Voisin, Cécile de France, Vincent Lacoste, Xavier Dolan.
Trop de Balzac tue Balzac ?
Non, parce qu’entre “Eugénie Grandet” et “Illusions perdues” il y a un monde.
Nous sommes à Paris au temps de la Restauration, un Paris flamboyant, étourdissant, un Paris qui s’amuse, qui se débauche. Lucien de Rubempré ou Chardon, jeune poète, arrive à Paris, coaché par sa maîtresse ou protectrice, Madame de Bargeton, il est plein d’enthousiasme mais aussi plein d’illusions.
Paris lumière est un Paris de l’argent et du pouvoir et pour accéder à cette classe de pouvoir, il va lui falloir renoncer à ses valeurs et adopter celle de la classe dominante, ce que Lucien va faire avec brio. Il va se faire embaucher à la rédaction d’une petite Gazette, ces petits journaux qui fleurissaient à l’aube du XIXe siècle. Il va découvrir un monde de faux semblants, de mensonges et d’hypocrisie. Un monde où tout s’achète et tout se vend. Un monde cruel, où un individu ambitieux met ses bassesses au service de ses ambitions. Et c’est précisément ce que Lucien à la recherche de Rubempré va faire.
Malheureusement à l’image du poème repris par Brecht ” die Ballade vom Wasserrrad”, après être monté très haut, il arrive que l’on tombe bien bas. Lucien, toujours Chardon, ne s’en remettra pas.
Quelle expérience que ces 2h30 époustouflantes où l’on est entrainé dans une ronde infernale, où l’on passe de la salle de rédaction, bourdonnante comme une ruche à la frénésie du Boulevard du Crime. Paris est un lieu où l’on s’amuse.
A l’image de ce spectacle permanent, Giannoli nous offre une distribution majestueuse, rien que du beau monde. Avec ceux-là, on ne peut pas rater un film !!. A la jeune garde virevoltante répond l’arrière-garde littéraire. Ils sont tous à l’aise à la place que leur a assigné le metteur en scène, pas de fausse note.
“C’est un peu trop manichéen”, qu’à cela ne tienne, si le film tombe dans l’extrême, cela se défend, nous sortons de la Révolution et des guerres de l’Empire. Après l’angoisse et le stress, ne peut-on pas penser à s’amuser ? Clin d’œil contemporain !
Giannoli nous offre un grand spectacle, est-il besoin de s’appesantir sur ce que Balzac donne à voir, un monde corrompu par le pouvoir et l’argent, un monde factice où l’on fait et défait les réputations, un monde où l’on se perd au point de ne plus savoir qui l’on est, un monde où même les “fake news” existent.
Mais ce monde là, nous connaissons !!
Patricia Renaud pour le Clairon de l’Atax le 15/11/2021