FUB est le sigle de France Université Butembo, une association humanitaire et culturelle fondée en 1991 pour le soutien de l’enseignement au Nord Kivu, une région de la République démocratique du Congo (RDC), située au cœur de l’Afrique. Cette association collecte des fonds, des livres et du matériel pour aider à la construction et au fonctionnement d’établissements scolaires de l’école primaire à l’université et le cas échéant à soutenir des scolarités par l’octroi de bourses d’études.
Afin de faire mieux connaître l’action de la FUB, Colette Vexenat, habitante de Cuxac d’Aude et dynamique représentante audoise de cette association, a organisé le 9 novembre dernier une conférence sur la situation humaine et géopolitique au Kivu.
Le conférencier, Lucas Chuffart un prêtre assomptionniste, qui a exercé pendant 8 ans des activités de soutien au développement local, a expliqué à un public attentif la situation humaine et géopolitique de ce territoire situé sur l’équateur.
Le père Lucas Chuffart (Photo Colette Vexenat)
Un pays de cocagne aux habitants pauvres
Une situation pour le moins paradoxale puisque la richesse des ressources de ce territoire contraste avec la pauvreté de ces habitants. Le Kivu est un territoire parfois qualifié de « Suisse de l’Afrique ». Il bénéficie d’un climat tempéré et humide, d’un sol ou “tout pousse “, fruits et légumes, permettant de faire entre 3 et 4 récoltes par an. Son sous-sol est très riche en minerais divers or, diamants, etc. ainsi qu’en minéraux “stratégiques” comme le coltan (60 à 80% des réserves mondiales) et le lithium.
La population est dynamique avec des familles nombreuses de souvent 8 à 12 enfants lesquels constituent une sorte d’ “assurance vieillesse” en l’absence de tout système de sécurité sociale. Les activités de cette population sont principalement agricoles mais aussi fondes sur un artisanat qui exploite le bois des forêts équatoriales. Le troc occupe une place importante dans l’économie locale.
Si cette population se considère comme faisant partie de la RDC, elle est quasi ignorée du pouvoir central à Kinshasa. Et depuis 1960 date de l’indépendance, les fonctionnaires des service publics locaux ne sont que peu ou pas du tout payés par l’État qui ne finance pas ou peu les infrastructures indispensables (routes, bâtiments publics divers, électricité, etc.). Ces fonctionnaires, qu’ils soient militaires, instituteurs ou policiers, vivent du soutien que leur apporte la population. Cette situation a encouragé le développement de la corruption et de bandes armées commettant meurtres et exactions diverses. Un climat permanent d’insécurité s’est ainsi créé et a favorisé la concentration de populations. Ainsi Butembo, chef lieu régional, est passé de 500 habitants en 1950 à 2 millions actuellement ! Les équipements de base nécessaires à la vie d’une telle agglomération font défaut ou restent très partiels, et l’organisation sociale fait cohabiter des règles coutumières et une législation étatique peu développée, tandis qu’un état civil jusqu’alors inexistant est en cours de constitution…
La région est en état de guerre permanent depuis une trentaine d’année en raison de la richesse de ses ressources minières qui attisent les convoitises de ses voisins, de divers états et multinationales ; Cette situation a provoqué le déploiement de casques bleus de l’ONU dont l’action, financée par des grand pays contributeurs consiste surtout à défendre et sécuriser l’accès aux mines lesquelles exploitent un main d’œuvre locale dans des conditions insoutenables.
Un développement malgré tout
Pourtant le Kivu se développe lentement : à la fois grâce au dynamisme de sa population et à l’action de diverses ONG (Organisations Non Gouvernementales) où figurent en bonne place des organisations religieuses catholiques ou protestantes (la population du Kivu compte environ 70 % de catholiques et 25 % de protestants). Ces organisations qui collectent des fonds et du matériel, financent la construction par la population d’équipements publics, notamment en matière de santé et d’éducation C’est le cas de la FUB qui intervient tout au long de la filière éducative, de l’enseignement primaire à l’université : ici en finançant le construction par les habitants de classes en matériaux locaux (une salle de cours = 8000 €) , là en dotant les classes d’ouvrages et de matériel scolaire, ailleurs en attribuant des bourses à des étudiantes ou étudiants . Mais on part de loin : le conférencier explique qu’à son arrivée au début des années 1990 l’unique lycée local disposait d’un seul livre, un dictionnaire Larousse rangé dans le bureau du directeur !
Actuellement les besoins restent énormes, tant en matériel éducatif qu’en matériel médical. Les enseignements développés par les universités locales visent à parer à l’urgence en privilégiant la formation de cadres dans des domaines techniques comme l’électricité, l’informatique, la mécanique, la médecine, etc. La FUB recherche également des instruments de musique : surtout des instruments “cuivre” : trompettes, clarinettes, trombones etc…
L’idée est d’éviter que ces cadres se forment à l’étranger et y restent au lieu de revenir aider le pays.
A l’issue ce cette conférence dont le grand mérite a été d’éclairer le public d’une manière claire et objective sur la situation et les conditions de vie dans le Kivu, on ne peut s’empêcher de penser qu’à l’heure actuelle, les ONG et particulièrement les organisations religieuses sont des acteurs essentiels qui protègent les populations locales contre les exactions des États et multinationales régies par la seule loi du profit. Depuis près de 7 siècles nous devons une partie de notre confort à une colonisation qui continue sous d’autres apparences.
La chorale Si Dièse (Photo HR)
A l’issue de la conférence le public a pu assister avec un grand plaisir dans la chapelle de Nd de Magri à un concert de chants africains magnifiquement interprétés par la Chorale Si Dièse.
La rédaction du Clairon de l’Atax le 17/10/2022