Une alerte pour sensibiliser au risque de tsunami en méditerranée.

Signalisation tsunami (Image par scym de Pixabay)

En 2007, le sénateur Roland Courteau remettait un rapport fustigeant l’impréparation de l’État pour alerter les populations en cas de tsunami en France métropolitaine. La mémoire du tsunami de Sumatra de 2004 était vive, il fut écouté. Le dispositif d’alerte dans l’Atlantique du Nord-Est et la Méditerranée est opérationnel depuis 2012. Il est coordonné par la Commission océanographique intergouvernementale de l’UNESCO. En 2019, Roland Courteau constatait les progrès réalisés et ceux qui devaient être faits. En particulier la sensibilisation au risque et la mise en place d’exercices de préparation.

Le matin du vendredi 19 janvier 2023, neuf préfectures du pourtour méditerranéen ont émis une alerte via le système FR-ALERT. Un signal sonore strident a retenti depuis les téléphones portables des habitants accompagné d’une notification détaillant le comportement à adopter en cas d’alerte tsunami. Il s’agissait d’un test à grande échelle du système et aucune réaction n’était attendue de la part de la population.

Deux messages ont été émis. Le premier pour signifier le début de l’exercice, le second pour le clore. FR-Alert fonctionne même si les téléphones sont en mode hors connexion, sans installation préalable. Les notifications, qui peuvent transmettre des informations sur la nature du risque, la localisation du danger et la conduite à tenir, sont accompagnées d’un signal sonore spécifique, même si le téléphone est en mode silencieux.

L’évènement a surpris. Des habitants disent avoir d’abord pensé à un virus. Certains ont reçu les notifications en double ou en anglais. Et de manière plus inquiétante, certains n’ont rien reçu. La préfecture maritime compte sur la remontée d’éventuels dysfonctionnements dans le cadre d’un retour d’expérience. D’ores et déjà, la configuration des téléphones explique la plupart des comportements constatés. Et il apparaît primordial de conseiller à chacun de vérifier qu’il n’a pas désactivé la réception d’alertes gouvernementales.

L’alerte a été reçue dans les Alpes-Maritimes, le Var, les Bouches-du-Rhône, le Gard, l’Hérault, l’Aude, les Pyrénées-Orientales, la Haute-Corse et la Corse-du-Sud. Des skieurs, à Font-Romeu se sont interrogés sur la finesse du ciblage. Et sur la plage des chalets, à Gruissan, des promeneurs ont vainement recherché le point haut où ils auraient dû se réfugier en cas d’alerte réelle.

Le comportement à adopter est de se rendre, à pied, vers un point haut. Dans les plaines littorales, un tsunami peut pénétrer profondément à l’intérieur des terres. La préfecture maritime compte sur ce test pour sensibiliser la population des communes littorales concernées à la réception d’une alerte sur smartphone et rappeler les réflexes à adopter.

En 2019, Roland Courteau relevait des fragilités. L’installation de sirènes pour prévenir les populations lui paraissait essentielle, d’autant qu’en cas de séisme proche des côtes, les réseaux de communication traditionnels (téléphonie fixe et mobile par exemple) peuvent devenir inutilisables.
En outre, il précisait : « Des campagnes de sensibilisation incitant aux bons réflexes, à ce qu’il faut faire ou ne pas faire, doivent être répétées en recourant au plus grand nombre possible de vecteurs de communication (expositions, colloques, brochures, dépliants, affiches, communiqués de presse, émissions de radio…). Une signalisation spécifique ou encore l’organisation d’exercices d’entraînement1 simulant l’arrivée d’un tsunami et l’évacuation d’une zone sont d’autres actions à mettre en place. Ces exercices sont indispensables pour identifier les dysfonctionnements et améliorer l’efficacité des dispositifs existants. Des cartes en vue des évacuations doivent permettre de repérer les voies utilisables pour l’acheminement des secours et l’évacuation des populations.

En 2020, l’UNESCO annonçait qu’à la lumière de nouvelles analyses statistiques, la probabilité qu’un tsunami de plus d’un mètre déferle sur la Méditerranée dans les 30 prochaines années était proche de 100 %. Cette analyse avait notamment été alimentée par les travaux d’une équipe de volcanologues de l’université de Pise, réévaluant à la hausse le risque de tsunami sur les bords de la mer Tyrrhénienne. Ils ont identifié sur l’île de Stromboli les traces de trois tsunami entre le XIVème et le XVIème siècle. 
Ces indices sont concordants avec le tsunami engendré par le tremblement de terre de Naples du 25 novembre 1343. La destruction spectaculaire de la puissante cité marchande d’Amalfi avait frappé les contemporains de l’évènement. Outre l’activité sismique significative le long de la faille nord-africaine et en Italie du Sud, l’activité volcanique du Vésuve, du Stromboli ou de l’Etna, ou un glissement de terrain peuvent provoquer des tsunamis dévastateurs. Ainsi, en 1908, un tsunami a fait plusieurs dizaines de milliers de victimes à Messine. Si la mémoire d’évènements cataclysmiques s’est perdue, lors des cent dernières années, la méditerranée a connu près de cent tsunamis. 

Ainsi, en 2003, un tremblement de terre en Algérie a provoqué un tsunami qui a frappé les côtes des îles Baléares et le sud de la France. Dans ce cas, les habitants des territoires côtiers disposent d’un peu plus d’une heure pour se préparer comme le détaillait l’alerte factice du 19 janvier
Espérons que, comme l’appelait Roland Courteau de ses vœux, ce test soit l’occasion d’une prise de conscience et que nos concitoyens incitent leurs élus à mettre en place le balisage piéton qui dans une situation réelle, face à des routes immanquablement engorgées, serait une ligne de vie.

Laurent Fabas pour le Clairon de l’Atax le 21/01/2024

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