Le marché de la santé.

Pendant des années le système de santé français était présenté comme « le meilleur du monde » … Mais Les français ont découvert une autre réalité lors de la crise sanitaire de la Covid-19. Actuellement notre pays est placé au 15° rang mondial entre l’Autriche et la Belgique.

Pilulier (Image par Kevin Phillips de Pixabay)

En qualité de béotien de la santé, si ce n’est de ce que j’ai pu apprendre de ma stratégie personnelle pour me soigner, je suis interpellé, comme beaucoup d’entre nous, par la crise sanitaire que nous venons de vivre et cela m’a amené à me questionner sur notre système de la santé.
C’est cette réflexion que je vous propose de partager et plus : d’en discuter.  

Pour en poser le cadre, je commence par cette question : combien nous coûte la santé ?
Tout d’abord quelques repère chiffrés :

Au niveau mondial le PIB est de 77328 milliards de dollars dont 10% sont attribués aux dépenses de santé, soit 7732 milliards de dollars. Pour situer les enjeux, les dépenses militaires mondiales, en constante augmentation, c’est 3,9% du PIB mondial.
En France, le PIB est de 2350 milliards d’euros, dont 11, 2% attribués à la santé, soit 263 milliards d’euros, dont 184 pris en charge par la Sécurité sociale.
Pendant des années le système de santé français était présenté comme « le meilleur du monde » … Mais Les français ont découvert une autre réalité lors de la crise sanitaire de la Covid-19. Actuellement notre pays est placé au 15° rang mondial entre l’Autriche et la Belgique.

Au départ, selon la formule du CNR (Conseil National de la Résistance), – à chacun selon ses moyens et chacun selon ses besoins –, la Sécurité sociale reposait sur le partage du risque médical au travers des cotisations qui permettaient de prendre en charge la maladie de toutes et tous. Mais depuis des années, on nous a dit que ce système était devenu impossible, financièrement déséquilibré. On nous a bassinés avec le fameux « trou de la sécu » … Et pour résorber ce trou, on rogne partout : c’est ainsi que la liste des médicaments remboursés ne cesse de rétrécir, idem pour les soins. Se soigner coûte plus cher et le niveau de protection s’affaiblit. La proportion de Français qui ne se soignent plus, ou qui se soignent mal, augmente en continu…

Qu’a-t-on proposé ensuite comme réponse ?
Une forme de privatisation partielle, qui ne dit pas son nom : des « mutuelles complémentaires » ! En fait nos gouvernants successifs ont opéré un glissement progressif des dépenses de santé de la Sécurité sociale vers des assurances privées, qu’elles se nomment mutuelles ou non. Du coup, la part payée par l’assuré augmente… mais pas toujours la qualité des soins. Récemment, sous prétexte d’une « reste à charge zéro », la facture a été transférée de l’opticien à l’assurance complémentaire… qui a augmenté ! Une manipulation ou le perdant est l’assuré !
Alors que les frais de gestion de la Sécurité sociale se situent entre 5 et 6%, ceux des assurances complémentaires sont de 20 à 25 % ! Il faut bien payer ces publicités débiles qui encombrent nos cerveaux et rémunérer les actionnaires des laboratoires pharmaceutiques ?
Résultat : en 1980, la part de la consommation de soins financés par la Sécu était de 80%… Aujourd’hui, elle n’est plus que de 60% et elle continue à décroitre.
Alors pourquoi ne pas englober les assurances complémentaires (mutuelles ou pas) dans la Sécurité sociale (Ce que proposait il y a quelques années, la CPAM d’Alsace / Moselle) : peut-être pourrions nous alors mieux rembourser les soins.

Tout cet argent brassé par le système de santé devrait nous amener à réfléchir aux enjeux réels auxquels nous sommes confrontés !
Les coûts dont on parle actuellement sont ceux des maladies et des traitements médicaux qu’elles entraînent. Et c’est bien ce « coût de la maladie » qui m’interpelle, car il continue d’augmenter d’année en année. Si incontestablement nous nous portons mieux et vivons plus longtemps, on s’aperçoit maintenant que le nombre d’années vécues en bonne santé diminue ! Le destin des hôpitaux devient alors aussi notre destin.
Aujourd’hui je vois la médecine consacrer des coûts importants à soigner à des maladies largement évitables, se cantonnant à réparer (plus ou moins bien) les dommages dont souffrent nos contemporains (cardiovasculaires, diabètes, cancers, maladies dégénératives, neurologiques, auto-immunes, et même psychiatriques), et qui sont à 80% générés par nos conditions de vie.  
Or une des perversions de notre comptage économique, basé sur le PIB, fait que les « coûts » de la santé viennent alimenter la croissance, but ultime des néolibéraux ! Les gouvernements qui leur sont inféodés opèrent une inquiétante métalepse (1) : ils ne cessent de déplorer le coût du système de santé qui par ailleurs contribue à la croissance du PIB qu’ils appellent de leurs vœux !
C’est, me semble-t-il, ne pas prendre le problème par le bon bout : s’attaquer aux conséquences, le « coût de la santé », sans s’attaquer aux causes ne peut que nous rendre finalement plus malades…

Mais voilà : dans le système néolibéral, la santé est un marché qu’il faut rentabiliser ! Mais la santé est-elle un marché ou un bien commun ?

Si c’est un marché, on comprend qu’il faille de plus en plus de malades qui coûteront, ou payeront, de plus en plus cher. De la même façon, qu’il faudrait, pour un fabricant d’ordinateurs, de plus en plus d’ordinateurs, de plus en plus chers, afin d’augmenter son profit !
Si c’est un bien commun, l’objectif serait que les coûts de la maladie baissent par l’augmentation du bien-être, de la bonne harmonie entre les gens, d’une vie plus naturelle, d’une bonne gouvernance.

Mais qui évoque cela chez nos politiques ?
Pour expliquer mon propos, je pense aux médecins chinois, des temps anciens, qui étaient payés en fonction de la santé de leurs patients…L’objectif serait alors d’obtenir un meilleur rapport qualité-coût du système de santé : dans ces conditions, le but serait d’avoir de moins en moins de malades, lesquels devraient être soignés par les traitements simples, souvent tombés dans le domaine public, qui ne seraient donc plus rentables pour les industries pharmaceutiques.  
Celle question a été illustrée d’une façon particulièrement spectaculaire lors de la crise sanitaire de la Covid-19 par le débat enragé  sur la chloroquine !  Ce médicament peu cher, utilisé depuis des années, fut subitement classé en médicament dangereux, vénéneux (il fallait oser !) … On a bien compris que par cette mesure insolite il s’agissait de préparer et laisser se développer un marché pour les vaccins, bien plus intéressant financièrement pour l’industrie pharmaceutique, dont l’influence, comme les marges et les bénéfices ont dépassé toute mesure.
Souvenons-nous que dans des entreprises marchandes, comme les industries pharmaceutiques, il faut produire pour le moins cher donc réduire les coûts, notamment du personnel et des structures, tout en vendant plus et le plus cher possible, par exemple en vaccinant le plus de personnes possible… Cela laisse la part belle aux actionnaires !

Toute cette stratégie ne peut se réaliser  qu’au moyen de la pression des lobbies qui assurent le contrôle tant de la recherche, que de la presse spécialisée, et organisent la promotion de médicaments « nouveaux », tout en dictant les pratiques et usages idoines dans les milieux hospitaliers.
Je voudrais citer ici un rapport de 2005 de la Chambre des Communes du Royaume-Uni, lequel posait un diagnostic sans détours : « L’industrie pharmaceutique trahit ses responsabilités à l’égard du public et des institutions. Les grandes firmes se sont de plus en plus focalisées sur le marketing, plus que sur la recherche, et elles exercent une influence omniprésente et persistante, non seulement sur la médecine et la recherche, mais sur les patients, les médias, les administrations, les agences de régulation et les politiques. (…) Elle s’est imbriquée dans tout le système, à tous les niveaux. C’est elle qui définit les programmes et la pratique médicale. Elle définit aussi les objectifs de recherche de médicaments sur d’autres priorités que celles de la santé publique, uniquement en fonction des marchés qu’elle peut s’ouvrir. Elle détermine non seulement ce qui est à rechercher, mais comment le rechercher et surtout comment les résultats en seront interprétés et publiés. Elle est maintenant hors de tout contrôle. Ses tentacules s’infiltrent à tous les niveaux. Il faut lui imposer de profonds changements. »
Tout est dit et cela éclaire nos questionnements sur la dernière crise sanitaire.

Comment redonner la priorité à l’intérêt du malade ?

On pourrait la déterminer assez simplement en prenant quelques décisions politiques, par exemple :

  • En taxant la malbouffe (produits transformés et/ou pollués) et en affectant le produit pour faire baisser le prix des aliments sains. La malbouffe est la principale cause de maladie, toutes catégories confondues. 85% de l’assortiment alimentaire courant, vendu en supermarché, tombe dans cette catégorie. Je pense particulièrement au sucre, cette épidémie mondiale qui provoque plus d’obésité, plus de maladies artérielles, plus de diabète et plus de cancers ;
  • En interdisant les pesticides. Couplés aux particules fines, ils sont une des causes de l’explosion du nombre de cas d’autisme et de maladies dégénératives… (Et pas seulement le glyphosate) ! La chimie toxique, ce sont plus de 100 000 substances dangereuses qui circulent dans l’environnement comme dans nos maisons et nous empoisonnent jour après jour. Prenons l’exemple du géant mondial de l’industrie pharmaceutique et chimique… Il s’agir de Bayer qui a racheté Monsanto… Monsanto fabrique toute sorte d’intrants et de pesticides qui rendent les gens et la nature malades en détruisant le sol et la biodiversité… Cette agriculture chimique produit pour les humains des aliments qui attaquent la flore intestinale, détruisent les systèmes immunitaires de nos organismes, lesquels sont chargés de combattre les agents pathogènes (virus, bactéries, parasites, certains poisons). Ainsi affaibli, notre propre système immunitaire nous attaque, augmentant notre prédisposition à contracter plus facilement des maladies graves, surtout pour les personnes âgées… Ensuite Bayer propose aux gens des médicaments pour se soigner des troubles de santé qu’il a contribué à créer…
  • En interdisant le diesel, les perturbateurs endocriniens, tous les poisons domestiques censés aider au ménage. Pour exemple, les particules fines c’est 430 000 morts et des millions de malades, en Europe et par an ! (Cf. : le « dieselgate » de Volkswagen ou Renault ) 
  • En remplaçant partout où cela est possible les traitements médicaux par des remèdes naturels ou des pratiques de santé montrant une efficacité comparable. Les médicaments et les traitements médicaux inutiles ou mal prescrits sont la troisième cause de mortalité en Occident 
  • En menant des vraies campagnes d’information sur les causes des maladies. Ce qui en dérangera beaucoup : les consortiums qui contrôlent aujourd’hui la quasi-totalité de la production agricole, de l’alimentation, de la chimie, de l’énergie, des transports, des médias, de la publicité et des médicaments. Là où prospèrent nos cancers, nos infarctus, nos AVC, nos diabètes, nos Alzheimer et Parkinson, dépressions et autres scléroses en plaques… 
  • En formant la population, les autorités, employeurs, employés et médias aux stratégies de santé ainsi qu’aux bonnes pratiques managériales et sociales. Le stress au travail est une épidémie qui fragilise aujourd’hui la santé de près de la moitié des travailleurs, sans que l’on ne s’en soucie sérieusement 
  • En développant des centres de ressources communautaires consacrés à l’accompagnement des malades 

Pour terminer, selon le Professeur ALLA, « des milliers de morts pourraient être évitées chaque année en s’attelant à améliorer l’organisation des soignants, l’observance des patients, les prescriptions médicales. Il y a là un véritable enjeu qui devrait devenir une priorité pour le ministère de la santé ». 

mental health (Image par Reggi Tirtakusumah de Pixabay)

Certes la maladie est par essence créatrice d’un déséquilibre qui ne peut être complètement évité ; mais peut-être qu’avec de telles décisions, les « coût de la santé » baisseraient.

Reste ce constat embarrassant qu’il faut bien mourir de quelque chose et que certains préfèrent regarder ailleurs : tant qu’ils ne sont pas trop affectés par la maladie ou la perspective de la mort, la question des dérives du système de santé n’est pas leur souci premier !
Pourtant l’enjeu me parait simple : réduire ce qui nous rend malades comme les maladies psychiques, la pollution, les dégâts du mauvais management, etc. Les gens se porteraient mieux, les finances de la Sécurité sociale aussi : Il serait possible de faire baisser les primes d’assurance-maladie de 40 à 60% en cinq ans. Ce qui devrait intéresser tout le monde y compris les néolibéraux qui se plaignent à longueur d’articles et d’interviews du poids excessif des « charges sociales » (alors qu’il s’agit de cotisations sociales).

Alors que notre médecine a fait d’importants progrès, notre société est devenue si toxique et pathogène que ces progrès ne suffisent plus pour améliorer notre santé !
Nous avons urgemment besoin d’une autre approche audacieuse, et pertinente…Et qui au final coûterait moins cher ! Elle demande plus de lucidité mais aussi plus d’intégrité, mais elle repose sur une condition première : ne plus considérer la santé comme un marché, mais comme un bien commun… Parions que nos gouvernants néolibéraux feront tout pour s’opposer à cela…

            Oncle JEF pour le Clairon de l’Atax le 12/07/2020

 

(1) Métalepse : c’est une figure de style par laquelle on substitue la cause par la conséquence et inversement. Dans le cas présent on déplorer les causes (le coût de la maladie) de ce dont on chérit les effets (la croissance).

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1 commentaire

Merci, Oncle Jef !
L’homéopathie est encore remboursée, mais jusqu’à quand ?… Les médecines douces et/ou alternatives ? T’as qu’à croire !
Quand aux médicaments naturels, j’ai appris récemment par mon toubib qu’il n’y a que 3 pharmacies sur Narbonne qui travaillent avec le laboratoire Inovance (par exemple)…
Quand à l’Hydroxichloroquine, qui coûte 3 francs-six sous, les médecins peuvent à nouveau la prescrire sous condition que les pharmacien.ne.s doivent vérifier avant la délivrance… Le remboursement sera différent selon la prescription. Arnaque à tous les étages !!! (Voir à ce sujet la gazette N° 1 éditée par les avocat.e.s du site d’actions collectives mysmart.com).
Et, pour finir, les herboristes ont toujours, à ma connaissance, l’interdiction de vendre l’Artemisia annua… “Pas assez chère, mon fils !…”
Pauvres de nous ! HELP !

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